Thèse de doctorat, 2019

Nous proposons un sujet de thèse, qui débutera en octobre 2019 et sera financée par une allocation doctorale de l’Université de Lille, sur le sujet :

« Interfaces cerveau-ordinateur exploitant les potentiels évoqués somesthésiques »

Si vous souhaitez candidater sur ce sujet, merci de nous envoyer un courriel dans un premier temps. La description du sujet de recherche est également disponible dans un document PDF.

SSSEP-based BCI

Résumé

L’objectif de cette thèse est d’évaluer les possibilités offertes par une modalité d’interfaçage entre le cerveau humain et un ordinateur très peu étudiée à ce jour, à savoir l’évocation puis la détection de potentiels somesthésiques. De multiples catégories d’interfaces cerveau-ordinateur (ICO) ont été proposées durant les vingt dernières années. Malgré tout, très peu d’applications concrètes sont disponibles à ce jour pour les utilisateurs finaux. Les quelques modalités d’interfaçage qui pourraient établir un canal de communication fiable nécessitent de monopoliser le système visuel de l’utilisateur, interdisant de ce fait un nombre immense d’applications dans lesquelles ce dernier doit avant tout observer son environnement. Quelques études ont porté sur l’exploitation des potentiels évoqués somesthésiques stationnaires (PESS), qui sont détectables dans les signaux cérébraux d’un individu lorsque ce dernier perçoit par exemple des stimulations tactiles répétitives. Ce sont des modalités de stimulation de ce type que nous allons étudier durant cette thèse, ainsi que les possibilités d’interaction ICO qu’elles pourraient autoriser.

Contexte de travail

Depuis plus de dix ans, les chercheurs de l’équipe BCI du laboratoire CRIStAL étudient les possibilités offertes par les ICO pour compenser les handicaps moteurs sévères. Ils ont notamment évalué les apports potentiels des ICO hybrides pour offrir une aide à la communication pour des personnes affectées par des maladies neuromusculaires comme la myopathie de Duchenne [1,2]. L’équipe a acquis plusieurs systèmes d’électro-encéphalographie (EEG) qui lui permettent de mener en autonomie des études expérimentales amont, mais elle a également établi des contacts privilégiés avec le service de neurophysiologie clinique du CHRU de Lille. Ce contexte de travail permet d’envisager à court terme la réalisation d’études cliniques, tant sur des sujets sains que pathologiques, en vue de valider les approches méthodologiques qui justifieront l’intérêt de la nouvelle modalité d’interaction par évocation puis détection de PESS.

Description des travaux

L’étude bibliographique portera à la fois sur des aspects méthodologiques et sur des aspects théoriques. Dans un premier temps, il s’agira d’établir un état de l’art des méthodes qui permettent d’évoquer de façon fiable des potentiels somesthésiques (PES). Quelques études, déjà anciennes, ont fait mention de dispositifs tactiles efficaces [3] qui permettent d’évoquer des PES stationnaires, c’est-à-dire d’induire des oscillations des activités de populations de neurones du cortex sensoriel primaire à une fréquence identique à celle de la stimulation tactile. Une étude préliminaire a été menée dans l’équipe BCI à l’occasion d’un stage de master 2, laquelle a montré la difficulté de reproduire les expériences relatées dans ces articles. L’analyse de l’état de l’art devra permettre de sélectionner les méthodes de stimulation pouvant être reproduites dans le contexte local de travail, en vue de définir une première expérimentation clinique qui se déroulera à la fin de la première année de thèse.

Du point de vue théorique, il s’agira d’étudier les méthodes de traitement de signal qui autorisent la détection des oscillations PESS dans les signaux EEG. Ces signaux électrophysiologiques sont excessivement bruités et une part prépondérante de l’activité cérébrale de l’individu n’est pas corrélée à la stimulation tactile répétitive qu’il perçoit, rendant très complexe le problème de la détection. Dans un premier temps, il faudra évaluer l’apport, pour la détection d’oscillations induites par une stimulation, des techniques habituelles de traitement des signaux EEG : filtrages spatial et temporel, localisation de sources, fusion d’informations extraites de plusieurs signaux, analyse de cohérence, etc. Ensuite, il faudra également proposer et évaluer l’efficacité de méthodes qui permettent de mettre en évidence des variations temporelles des signaux EEG qui ne seraient plus nécessairement périodiques. Par exemple, on pourra envisager d’utiliser des stimulations tactiles suivant une séquence binaire pseudo-aléatoire (SBPA), comme cela a été fait récemment pour des paradigmes visuels [4].

Sur la base de ces études initiales, le travail de thèse consistera à proposer et tester l’efficacité de paradigmes ICO exploitant les PESS. Par exemple, on sait que l’attention portée par l’individu à une stimulation particulière module l’amplitude des oscillations corticales que cette dernière induit [5]. On sait également que l’amplitude des oscillations évoquées par un stimulus sensoriel est modulée lorsque l’individu réalise ou imagine un mouvement (phénomène de « gating », [6]). Ces deux exemples, mais pas uniquement, permettent d’imaginer que de nouvelles techniques d’interaction doivent être possibles, dans lesquelles l’activité mentale de l’individu entraînerait des modulations des PES, stationnaires ou non, que l’ordinateur pourrait détecter dans les signaux.

Bibliographie

  1. Interface cerveau-machine hybride pour pallier le handicap causé par la myopathie de Duchenne, Alban Duprès, Université Lille 1 – Sciences et Technologies (2016). hal.
  2. Hybrid BCI coupling EEG and EMG for severe motor disabilities, José Rouillard, Alban Duprès, François Cabestaing, Stéphanie Leclercq, Marie-Hélène Bekaert, Charlotte Piau, Jean-Marc Vannobel, Claudine Lecocq, Elsevier. AHFE 2015, Jul 2015, Las Vegas, United States (2015). doi, hal.
  3. Stability and distribution of steady-state somatosensory evoked potentials elicited by vibro-tactile stimulation, Christian Breitwieser, Vera Kaiser, Christa Neuper, Gernot R. Müller-Putz, Med Biol Eng Comput (2012) 50:347. doi.
  4. A review of Rapid Serial Visual Presentation-based Brain-Computer Interfaces, Stephanie Lees, Natalie Dayan, Hubert Cecotti, Paul Mccullagh, Liam Maguire, Fabien Lotte, Damien Coyle, Journal of Neural Engineering (2017), pp.1-39. doi, hal.
  5. A hybrid three-class brain–computer interface system utilizing SSSEPs and transient ERPs, Christian Breitwieser, Christoph Pokorny, Gernot R Müller-Putz, 2016, Journal of Neural Engineering, 13:(6) doi.
  6. Steady-state evoked potentials to study the processing of tactile and nociceptive somatosensory input in the human brain, Elisabeth Colon, Valéry Legrain, André Mouraux, Clinical Neurophysiology, (2012), doi.